De majestueux cocotiers occupent les plages de sable fin du Bénin, pays de l’Afrique de l’Ouest, dont je suis originaire. Bien alignés, en bordure de mer, ils présentent les caractéristiques dignes d’un paysage de carte postale. Ils semblent éternels. Ils étaient là depuis ma tendre enfance. Ils y sont encore aujourd’hui, bien enracinés. Ils offrent leurs abris de détente contre le chaud soleil à qui le veut, principalement aux nageurs venus honorer une mer douce et chaleureuse.
Le spectacle de la dégustation des noix de coco, fruits du cocotier, s’avère tout aussi merveilleux. Les vendeurs installés aux abords des chemins menant à la plage offrent les noix de coco pour quelques petits sous. Ils manient avec dextérité leur coupe-coupe aiguisé, pour préparer la noix à la consommation. Ils dégagent avec la lame acérée, une des extrémités de la noix, y insèrent parfois une pipette pour faciliter l’accès à l’eau de coco ; cette eau au goût exquis et aux propriétés exceptionnelles. Alors, plus besoin de verre pour étancher sa soif ; la noix volumineuse est portée à la bouche et tenue à pleines mains.
Quelle belle opportunité d’assister à un tel spectacle ! Bienvenue, dans « l’univers du cocotier ».
- Le cocotier et moi
Ma passion pour tout ce qui a trait au cocotier s’est éveillée à l’adolescence, lorsque j’ai découvert « l’arbre de vie » à la fois dans et autour de la concession paternelle. Sa singularité a très tôt captivé mon attention. Son aspect détonnait dans la végétation, d’autant plus que les arbres du jardin avaient plusieurs branches de tailles variées et à portée de main alors que la circonférence du tronc du cocotier, elle, semblait régulière de bas en haut. Il fallait lever la tête ou se positionner bien loin pour apercevoir son feuillage tout au sommet et ses fruits volumineux, défiant la gravité. Les hommes faisaient preuve d’ingéniosité pour grimper à ce tronc lisse.
J’ai vu des hommes se servir d’une corde attachée à leur taille puis au tronc de l’arbre et avancer en déplaçant progressivement la corde, par petit bout, pour accéder aux feuilles et aux fruits. L’insouciance de l’adolescence m’amenait à grimper directement au cocotier, à mains nues. J’étais heureuse de pouvoir m’élever quelques mètres plus haut, même si je ne parvenais jamais au sommet
Lors des festivités culturelles de plein air, le spectacle habituel consistait à se maintenir sur le ventre au sommet d’une branche bien frêle et flexible. C’était particulièrement impressionnant parce que la branche haute et fine était en apparence incapable de soutenir naturellement le poids du corps d’un être humain. Cette incapacité était si évidente que même les tam-tams et les chants d’animation de cette prouesse, scandaient des paroles incantatoires de défiance pouvant se résumer à ce qui suit : « s’il m’arrivait de tomber en quoi cela te concernerait il ? Ma chute ne relève que de ma seule responsabilité. Est-ce le mari de ta mère qui est celui qui a créé l’hôpital ? ».
Dans les eaux débordantes du fleuve Mono en crue, les riverains avaient posé plusieurs troncs de cocotiers. Enfants, au nombre de nos jeux, nous nous alignons à plusieurs, sur un des troncs, pour observer les poissons. Il fallait se maintenir en équilibre pour ne pas tomber à l’eau. Le tronc lisse devenu glissant pour avoir séjourné dans l’eau, pouvait en effet se retourner au moindre mouvement. Ces troncs restaient sur place, sans se détériorer puisque nous les retrouvions aux mêmes endroits à la crue suivante. En tout état de cause, ces observations confirment de la résistance de cet arbre, au-delà des apparences.
Je ne rate pas les occasions de me procurer les noix de coco, chaque fois que je croise les vendeurs ambulants. L’eau de coco est délicieuse et la pulpe blanche de la noix peut être consommée en l’état ou transformée de multiples façons. Les jeunes filles de ma génération ont presque toutes appris à cuire les friandises à base de noix de coco, notamment le « toffi ». Je sais aussi fabriquer des balais ménagers de tous types. Plusieurs membres de ma famille ont eu comme activité génératrice de revenus, la préparation et la commercialisation des produits à base de coco.
Pour la plupart des africains, l’eau que l’on retrouve à l’intérieur de la noix de coco, pourtant hermétiquement fermée, relève d’un mystère. D’ailleurs en Côte d’Ivoire une expression populaire traduit cette intrigue : « tu verras qui a mis l’eau dans coco ! » signifiant « tu verras de quel bois je me chauffe ».